Présentation et analyse du listing
Notre organisation professionnelle considère comme réaliste que la France recèle 500 dépôts conséquents d’artifice de divertissement. En se fiant aux « pages jaunes », c'est-à-dire sans tenir compte des micro entreprises qui se décorent du titre d’indépendants sur Internet.
Le ministère du développement durable, lui, n’en connaît qu’environ 50. (voir pièce jointe)
90% d’inconnus ! Qui dit mieux ?
Si on analyse un peu plus finement ces chiffres, le constat est encore plus accablant. Nous publions dans cet article un extrait des tableaux se trouvant sur le site du MEDDE concernant les rubriques des ICPE 4210 et 4220 reprenant les entreprises enregistrées ou autorisées par l’administration à stocker et/ou à manipuler des artifices de divertissement. Comme çà chacun pourra se reconnaître… ou pas. Bien sûr on va nous opposer que ne figure pas les entreprises soumises à déclaration. Nous répondrons simplement deux choses. La première est qu’il nous semble impossible –et nous sommes des praticiens- d’exploiter une entreprise de pyrotechnie de divertissement avec des capacités de stockage limitées à 150kg réel de 1.4G ou 90kg réel de 1.3G. Nous y reviendrons. La seconde, c’est que la presque totalité des établissements soumis à déclaration sont hors la loi dans la mesure où les exploitants ont pris la précaution de ne pas demander l’agrément technique obligatoire. Car les conséquences financières en découlant ne leur conviennent pas ! Idem pour les établissements soumis à enregistrement.
Deux rubriques. Celle qui porte le numéro 4210 correspond au manipulations, mise en communication électrique ou pyrotechnique. Et celle qui porte le numéro 4220 concerne le stockage dormant.
Si le législateur a distingué ces deux activités c’est parce que la première est beaucoup plus dangereuse que la seconde. Mais l’une ne va pas sans l’autre. Que faire d’un dépôt dormant où on n’a pas le droit d’ouvrir les cartons ? Sauf pour un centre logistique cà n’a pas d’intérêt. Pourtant la plupart des dépôts d’artifice ne disposent que de stockage dormant. On ne peut y ouvrir des cartons. Là encore, il y a une dérive à résorber. Des petits malins ont introduit la notion de « picking » en se gardant bien de le traduire de l’anglais « ramassage ». Mais pour « ramasser », il faut auparavant ouvrir le carton, ce qu’on ne peut faire dans le cadre de la 4220 ! On n’en sort pas ! Alors on triche, parce qu’après le « picking » il faut bien aussi manipuler et pourquoi pas mettre en communication (4210) . Alors on explique qu’on met en communication sur les lieux de tir. Mais alors, si on comprend bien, cette opération réputée dangereuse qui a droit à un numéro de la nomenclature des établissement classés, peut être, sans problème « exfiltrée » pour être faite non pas n’importe où mais sur les lieux publics. On marche sur la tête. Mais rassurez-vous, là encore ce n’est qu’une posture, car la plupart des opérateurs « préparent » leurs artifices ailleurs que sur le site de tir, c'est-à-dire n’importe où, dans leur sous sol, le garage, le parking, leur appartement… Parce que le jour du feu d’artifice on n’a guère le temps de confectionner les pièces d’artifices. Mais on jure, y compris sur sa tête, que tout est fait sur place le jour même. D’ailleurs n’est-on pas livré le jour même sur site par son fournisseur… qui se trouve à 500Km de là ? Avoir un dépôt connu de l’administration c’est rare mais c’est bien. Mais avoir un dépôt qui en plus est adapté aux exigences du métier, c’est extrêmement rare. Mais c’est très bien !
Si on regarde de plus près le tableau, on remarque tout de suite la disparité géographique des ICPE. Il n’y en a pas beaucoup dans le nord et l’est de la France, et plus dans le sud . Il n’y en a pas dans tous les départements mais certains départements en ont plusieurs. Certaines sont en construction, d’autres à l’arrêt…
Dans certains départements il n’y en a pas, mais on y trouve des entreprises de pyro qui peuvent faire jusqu’à deux millions de CA annuel avec sans doute un vague dépôt sans agrément technique, bien entendu.
On remarque aussi une grande disparité dans les timbrages qui vont de quelques kilos à plusieurs centaines de tonnes !
Si on prend le temps de rechercher les chiffres d’affaire de ces différentes entreprises on détecte de grandes incohérences entre les capacités de stockage et les chiffres d’affaire. Comment une entreprise qui déclare stocker quelques dizaines de kilos d’explosif peut-elle faire un chiffre d’affaire identique, voire supérieur, à une entreprise qui est autorisée à stocker plusieurs tonnes ? Nous nous sommes amusés à créer un indicateur : le ratio entre le chiffre d’affaire déclaré et la quantité stockée officiellement ; le résultat est décoiffant, il évolue entre 10 et 5000 ! Est-ce bien raisonnable ? Et on ne parle pas de ceux, nombreux, qui « sont livrés le jour même, sur le site de tir ». Ceux là se moquent évidemment du monde.
L’obligation du registre d’entrée et sortie pour tous les opérateurs économiques dans l’artifice va sans doute, au moment des contrôles, nous permettre de comprendre ces énigmes.
On doit même aller plus loin en analysant la ventilation des quantités stockées en division de risques (DR). Le plupart des dépôts sont prévus pour contenir des produits de DR 1.4G les moins dangereux, mais, malheureusement, utilisés très minoritairement dans les spectacles pyrotechniques (plus le spectacle est important moins il y a de 1.4G qui sont des petits artifices en vente libre). La DR 1.3G est la plus utilisée en pyro de divertissement (bombes, batteries de plus de 30 mm de calibre), pourtant elle est souvent absente (officiellement) des dépôts. La DR 1.3G n’est présente que dans de très rares dépôts, c’est curieux parce que tous les spectacles pyrotechniques contiennent des produits de cette division comme les bombes, les chandelles ou les batteries de plus de 30 mm de calibre). Les marrons d’air ou coups de canon ou annonce sont tous classés en DR 1.1G. Les dépôts d’artifice autorisé à stocker des articles de la DR 1.1G se comptent littéralement sur les doigts d’une main. La légende qui est colportée que certains de ces produits sont classés autrement a été justement créée pour servir de parefeu à çà. (Comme les inflammateurs électriques qui seraient en vente libre.) Au contraire, un seul de ces produits mélangé dans un conditionnement d’autres produits réputés beaucoup moins dangereux, fait basculer l’ensemble du colis en DR1.1G, y compris les articles peu dangereux isolément !